Si l'évolution de la plupart des troubles mentaux (psychoses, troubles del'humeur, troubles anxieux et troubles névrotiques) et des troubles des conduites (conduites suicidaires ...) est sensible au contexte événementiel (l'apparition et la pérennisation d'un épisode est souvent liée à la survenue d'un événement stressant de la vie), deux catégories de troubles psychiatriques sont définies par le rôle déclenchant spécifique de certains événements de la vie : il s'agit des troubles de l'adaptation et des états de stress post-traumatique.
TROUBLES DE L ADAPTATION
Ces troubles se situent aux frontières du fonctionnement normal et du fonctionnement pathologique avéré. Ils ont la particularité de survenir en réaction à un facteur de stress identifiable.Les troubles de l'adaptation sont fréquents : en consultation psychiatrique ambulatoire, ils représentent 5 à 10% des patients. Ils sont parmi les diagnostics psychiatriques les plus fréquents chez des patients hospitalisés pour des problèmes médicaux ou chirurgicaux, le facteur de stress identifiable étant alors souvent la maladie physique. Les troubles réactionnels ou de l'adaptation sont caractérisés par l'apparition de symptômes cliniquement significatifs dans les registres émotionnels ou comportementaux, en réaction à un ou plusieurs facteurs de stress venant
déborder les capacités d'adaptation du sujet. Le caractère inadapté (pathologique) du trouble se manifeste par une souffrance marquée plus importante que celle qui était attendue compte tenu de la nature du facteur de stress ou bien par une altération significative du fonctionnement social, professionnel ou scolaire.
Les symptômes peuvent en être variables et intéresser différents registres : émotionnel : anxiété, tristesse, retrait affectif, irritabilité, agressivité somatique : céphalées, douleurs musculaires, insomnie, fatigue,sensations de tension ou de déséquilibre, troubles fonctionnels digestifs, cardio-vasculaires ou respiratoires cognitif : difficultés de concentration et d'attention, troubles de la mémoire à court terme, intrusions de pensée, ruminations mentales, baisse de l'efficience scolaire ou professionnelle comportemental : opposition, fugue, inhibition sociale, isolement, actes délictueux, abus de médicaments ou de toxiques (tabac, alcool, drogues), comportement suicidaire. Le trouble de l'adaptation est, par définition, transitoire. Il apparaît rapidement (au plus tard trois mois) après un événement stressant clairement identifiable et cesse dans les six mois qui suivent sa disparition. Les Troubles de l'Adaptation comme les autres pathologies réactionnelles (la réaction aiguë de stress, l'état de stress post-traumatique) peuvent survenir à tout âge et touchent les deux sexes avec cependant une prédominance féminine chez l'adulte (2/3 des cas).
Le facteur de stress peut être unique ou multiple ; il peut se reproduire régulièrement ou être continu, toucher une seule personne, une famille entière, ou bien un groupe plus large ou une communauté. Certains facteurs de stress sont associés à des étapes spécifiques du développement et de la vie (entrée à l'école, départ du milieu familial, mariage, maternité et paternité, retraite,
veuvage,...). Les facteurs de stress les plus régulièrement retrouvés sont néanmoins communs (difficultés scolaires ou sociales, problèmes familiaux ou sentimentaux, difficultés professionnelles, usage de toxiques, ...). Il est important de noter que certains événements de vie a priori non traumatisants (déménagement, promotion, naissance) peuvent être à l'origine de troubles de l'adaptation chez certains sujets vulnérables. Malgré le flou sémiologique qui le caractérise, le trouble de l'adaptation demeure
l'un des diagnostics les plus souvent portés chez l'adulte (10 %). L'apparition d'un trouble de l'adaptation est souvent favorisée par la coexistence d'un trouble de personnalité qui limite les capacités de réaction aux événements à certaines conduites stéréotypées. Cependant si ces symptômes apparaissent chez un patient présentant un trouble anxieux ou dépressif spécifique préexistant, c'est
ce diagnostic et non celui du trouble d'adaptation qui devra être porté. Le trouble de l'adaptation doit aussi être distingué de la pathologie posttraumatique, réactionnelle à des événements majeurs et de ce fait moins dépendante de la variabilité des caractéristiques individuelles.
PHATOLOGIES POST-TRAUMATIQUES
Le terme de traumatisme psychique est utilisé pour désigner une blessure, un phénomène d'effraction et d'envahissement du psychisme par un afflux d'excitations violentes, vécues comme agressives et susceptibles de déborder les capacités de défense, psychologique de l'individu. C'est la nature même et l'intensité exceptionnelle du traumatisme qui donnent aux symptômes leur
caractère spécifique, l'ensemble justifiant de la classification des états de stress post-traumatiques au sein des troubles anxieux.
Cette catégorie est essentiellement définie par l'intensité de l'événement traumatisant dont les conséquences sont susceptibles d'affecter un grand nombre de victimes ou de témoins du fait de la menace objective représentée pour leur intégrité physique ou psychologique : agressions, viols, accidents, catastrophes, confrontations subites à la mort... - La réaction aiguë de stress se développe dans les suites immédiates d'un traumatisme ayant eu un impact émotionnel majeur. Son évolution est souvent
spontanément résolutive en quelques jours à quelques semaines et centrée sur la répétition involontaire et stéréotypée de l'événement traumatique dans toute son acuité émotionnelle, que ce soit sous forme de cauchemars, d'images récurrentes ou de pensées obsédantes. Ces reviviscences sont soit spontanées, soit provoquées par la confrontation à des stimuli évoquant le traumatisme ou le contexte dans lequel il est survenu, stimuli auxquels le patient tentera souvent de se soustraire par des conduites d'évitement parfois invalidantes. Ces symptômes sont généralement accompagnés d'une anxiété permanente avec exagération de la réaction de sursaut et hypervigilance, parfois source d'insomnie et de tension. Dans les suites immédiates des traumatismes les plus violents, des symptômes dissociatifs peuvent être observés : hébétude, mutisme, errance, impressions de détachement, de dépersonnalisation, de déréalisation. L'impossibilité de se souvenir de tout ou partie de l'événement en est une conséquence possible. Plus spectaculaires que les symptômes précédemment décrits, les symptômes dissociatifs seraient associés à un risque accru de chronicisation et de développement de l'état de stress post-traumatique.
- L'état de stress post-traumatique n'est souvent que la continuation au-delà d'un mois des symptômes observés dans la réaction aiguë de stress. Il peut aussi apparaître avec retard par rapport au traumatisme, le plus souvent dans les jours ou les semaines qui suivent ce dernier mais parfois aussi après plusieurs mois ou années. Le syndrome de répétition reste au centre du tableau avec les émotions intenses qui lui sont associées. L'hypervigilance s'y associe ainsi que l'évitement de certaines situations mais également un certain degré d'émoussement affectif, une tendance à l'isolement et au détachement, une raréfaction des intérêts et des projets ou une modification notable de la vision du monde, éventuellement sous-tendue par des sentiments marqués de culpabilité ou de rejet. Dans environ un tiers des cas, une évolution chronique est à craindre. La probabilité de survenue de ce syndrome et son pronosticdépendent en partie du terrain sur lequel survient le traumatisme et notamment de sa comorbidité avec d'autres troubles psychiatriques ou avec un trouble de personnalité.- D'autres types de troubles (dépression, trouble panique, phobies,...) sont également susceptibles d'apparaître après un traumatisme violent soit isolément, soit en association avec ces manifestations.
LES TROUBLES ANXIEUX
La vulnérabilité anxieuse est non seulement susceptible de se manifester à l'occasion d'événements de vie, traumatiques ou non, mais également de manière apparemment spontanée à divers âges de la vie. Les principaux tableaux cliniques seront décrits ci-dessous par ordre chronologique d'apparition et de façon isolée, sans méconnaître cependant leur fréquente association chez les mêmes individus soit de manière contemporaine, soit de manière successive dans le temps. Plusieurs études longitudinales ont en particulier démontré que les troubles anxieux constatés chez l'enfant ne se retrouvaient pas obligatoirement sous une forme identique chez l'adulte, mais que leur présence augmentait notablement le risque ultérieur de développement d'un trouble anxieux ou dépressif.